La matinée avait été plutôt bonne.  Cent livres en trois heures de musique, d’accord, ça avait déjà été mieux, mais fallait être honnête ; je n’étais pas le chanteur du siècle, je n’avais pour moi que ce doigté un peu plus habile que la moyenne. Toujours est-il que, ça suffirait à payer le loyer de la semaine prochaine. On avait trouvé ce loft dans un coin que certains trouvaient très certainement un peu limite. Shyrel n’avait pas bronché, en le visitant. Et puis fallait être honnête, avec nos petits revenus irréguliers, ce grand espace était la seule chose qu’on pouvait vraiment se payer. Elle avait une chambre, moi un canapé, c’était bien plus que suffisant. De toute manière, à ce rythme, on repartirait bientôt d’ici. Bethzy n’était visiblement pas en ville, et ici ? Rien ne nous attendait. C’était simplement une étape sur notre route, un truc dont on pourrait faire une chanson. Tiens, pas mal, comme idée. A noter. Fourrant les billets dans le fond de ma poche, je refermais l’étui de ma guitare alors que quelques gouttes faisaient leur apparition. Fin du spectacle, y a plus rien à voir. De toute manière, j’étais vanné. Une nuit, entière, à trainer dans les bars de la ville, à faire la sortie des boites de nuit dans l’espoir vint de la croiser. S’en était pathétique. Alors, au levé du jour, j’avais juste eu à rentrer, pour trouver la blonde endormie dans une de mes chemises. C’est drôle comme je pouvais la trouver belle, sans pour autant que mon cœur ne chavire comme il avait pu le faire avec la brune. C’t’étrange, la chimie d’un être. Moi, je trouve. Je me suis allongée à côté d’elle, quelques secondes, seulement, avant que le sommeil de m’enveloppe tout entier. Avant que je ne me réveille, une heure plus tard, toujours dans cette même position, toujours sa présence, à mes côtés. Bordel mais qu’est-ce que j’avais fait ? Cette gamine m’avait suivi dans mes fantasmes les plus fous, à la recherche d’une femme qui ne voulait certainement pas être retrouvée, et pour quoi ? Bousiller sa carrière qui semblait enfin s’envoler, là-bas ? Quel con. Franchement, quel con. Alors j’étais sortie ; sans elle. Et revenait ; comme si de rien n’étais. « Trop de sucre, voilà le résultat que ça donne ! » la trace de chocolat sur le sol ne laissait aucun doute possible, elle en avait encore foutu partout. Chose qui ne serait certainement jamais arrivée avec un bon vieux café ; croyez moi. « T’es encore en vie ou faut appeler l’hôpital, service grands brulés ? » oui, mon humour manquait sérieusement de… d’humour, mais tant pis. M’affalant sur le canapé après avoir envoyer valser les billets sur la table basse, mes yeux se posaient sans vraiment trop de but vers l’écran posé non loin. What the… ?

Maladroite je l'étais et maladroite je le resterai toute ma vie. Heureusement pour moi que quasiment tout le monde m'appréciait pour ça et que certaines personnes disaient même que cela faisait parti de mon charme. Déjà, je ne savais pas que j'avais du charme, du moins j'en ai pas vraiment conscience. Avant de me rendre dans la salle de bain pour essayer de faire partir cette énorme tâche, je vérifiai que notre ordinateur portable n'avait pas reçu une seule goutte, parce que sinon j'allais me faire tuer par Angus et je tenais quand même à ma vie. Voyant que notre objet le plus précieux était sain et sauf, je me dépêchai d'aller me changer et enlever cette tâche, parce que si je la laissais sécher, elle ne partirait plus et je tenais beaucoup à la tenue que je portais. Alors que j'étais à moitié nue dans ma chambre, essayant de trouver une nouvelle tenue pour le restant de la journée, la voix de mon colocataire retentit dans l’entrepôt qui nous servait d'appartement. Si j'aurai été en face de lui, je lui aurai très certainement tiré la langue comme une petite fille mais n'étant pas dans la même pièce, je me contentai de laisser échapper un rire. Très drôle Gugus... Moi je dirai qu'il faudrait appeler les pompes funèbres, c'est plus radicale. Alors que j'enfilai un t-shirt deux fois trop grand pour moi par dessus un bas de jogging, je réalisai que j'avais laissé le mail de mon fan ouvert et l'ordinateur sur la table basse du salon où justement Angus se trouvait actuellement. Laissant un cri s'échapper de ma bouche, je me précipitai dans le salon, priant pour qu'il n'ai rien vu ou du moins rien lu. Mais en voyant la tête qu'il était entrain de faire, je compris rapidement qu'il avait fait ce que j'avais espéré qu'il ne fasse pas. Me stoppant net, je plongeai mon regard dans le sien, me mordillant légèrement et décidé de faire comme si de rien n'était. Et bien, tu en fais une tête. Tu as vu un fantôme ou quoi ? Je m'assis tranquillement sur le canapé, tout en refermant au passage l'ordinateur.