vous êtes amoureux. loué jusqu'au mois d'août
Il déambule dans cette grande maison. Maison qui n'est pas la sienne. Elle est bien trop belle, bien trop immense, ils ont pas les moyens, son frère et lui, pour une baraque de ce genre. Un château, ou plutôt un manoir, il sait pas trop, mais en tout cas, il aime bien. Il se voit bien passer sa vie ici, à faire du skate dans cette maison, à niquer le parquet entretenu à la perfection, à placarder les murs délicatement ornés de tapisseries d'affiches de groupes de rock. Mais c'est pas sa maison. Lui, il vit un peu plus loin dans le même quartier, dans une bicoque. Trey, il tourne dans une des cinq chambres de la maison. Celle-là, elle est à quelqu'un apparemment, mais y a personne pour le moment. « Putain t'es qui toi ? » Il se retourne soudainement. Il devrait pas être ici, mais il s'en moque. Tête brûlée, il a peur de presque rien, et certainement pas d'une fille qui jure. Mais elle est quand même jolie, cette fille. Blonde, comme lui. Les yeux noirs, comme lui. Léger grain de beauté sur le coin gauche de sa bouche. Il sourit. ce sourire ravageur et délicat à la fois dont lui seul détient le secret. « J'suis un fantôme de la maison. » Elle hausse un sourcil, croise les bras. Elle est même pas sur ses gardes. Elle voudrait juste comprendre. C'est ce qu'il se dit, Trey. « Je déconne. J'suis juste un voisin en fait. » Elle bouge pas, ça l'étonne pas vraiment, mais ça le rend mal-à-l'aise. Pourtant, il a pas envie de partir d'ici pour autant. Parce qu'elle est jolie, et qu'elle a l'air d'être un peu comme lui. Un peu je m'en foutiste, un peu anarchiste, un peu rebelle. « La porte d'entrée était ouverte alors j'en ai profité pour visiter. J'en ai toujours rêvé. » Elle prend un air offensé, mais sourit. Alors, il tend la main vers elle, sûr de lui, sûr de vouloir rester. Elle est jolie. C'est tout ce qu'il se dit, tout ce qu'il sait d'elle. Et il veut en savoir plus. « Trey Sullivan. » Ils se serrent la main, comme deux adultes. Ils n'ont que dix-sept et dix-neuf ans. Elle a la main douce, un regard profond, comme le sien. Qu'elle est jolie. « Fleur Harmond. » Fleur. Un beau contraste avec ce qu'elle a l'air d'être.

l'amour infini me montera dans l'âme
Il a réussi à s'introduire sans bruit dans la grande maison, encore une fois, appartenant maintenant à Fleur. Il a réussi à s'introduire dans cette chambre qu'il commence à connaître. Il aime bien faire ça, entrer par effraction, mais avec l'approbation de Fleur. Parce qu'il ne le ferait pas, si elle n'était pas d'accord, il n'oserait pas. Allongé sur le lit, il l'attend. Il pourrait l'attendre toute sa vie. Si seulement elle savait à quel point elle est tout ce qu'il a. La porte s'ouvre, et c'est bien elle, toujours si belle. Ce regard innocent, cet air sauvage et doux. « Fleur ! Fallait que je te dise, j'ai trouvé les trucs qu'on cherchait la dernière fois. » Sourire de vainqueur. Il est heureux là, avec elle. Mais il voit bien, dans les yeux sombres de Fleur, que quelque chose ne va pas. Il voit bien qu'elle n'est pas réceptive à son sourire, à sa joie. « Qu'est-ce qu'il y a ? » Inquiétude, crainte. Il espère, Trey. Il espère de tout son cœur qu'elle le considère toujours comme le seul qu'elle a toujours voulu. « Tu comptais me dire que ton frère t'a viré de chez lui ? » Trey entrouvre la bouche, mais ne sait quoi répondre. Il espérait qu'elle ne l'apprenne jamais. « Tu comptais me dire que s'il t'a viré, c'est parce que tu consommes toujours de la drogue ? » Il lui avait promis d'arrêter pourtant. Comme elle lui avait promis d'arrêter de se tailler les poignets. Ses si doux poignets horriblement marqués par des multitudes de cicatrices. « Tu comptais me dire que t'as couché avec ma meilleure amie ? » Les yeux noirs de Trey se remplissent de larmes, tout comme ceux de Fleur. Il savait. Il savait qu'un jour, elle saurait. Qu'un jour, son couple, si parfait, si pur, serait anéanti par ses conneries. Il voulait pas coucher avec cette fille. Il l'a jamais voulu. « Je t'aime, Fleur, t'es tout ce que j'ai. » Elle sourit. Son sourire contraste avec ses larmes. C'est un méli-mélo de sentiments. Douleur, passion, trahison, amour. « Je t'aime aussi, Trey. » Un sourire sur le visage du garçon. Léger sourire, mais sourire de soulagement. Elle l'aime, il le sait. Elle ne ment pas. Du bout de ses doigts, elle caresse la joue de Trey, mouillée de larmes. « Mais c'est terminé. » Il a soudainement l'impression que son cœur le lâche, qu'il implose et que toute sa santé mentale devient alors dangereusement instable. « Sors de chez moi. » Fleur aussi, elle pleure. Fleur aussi, elle est triste. « S'il te plaît, je suis désolé. » Et puis, il voit bien dans son regard à Fleur, qu'elle va péter les plombs. Il voit bien, que ça va s'effriter. Que leur amour qu'il pensait immunisé contre tout, va s'effondrer. Il voudrait s'approcher d'elle, mais elle le repousse, violemment. « Sors de chez moi ! » Cette fois elle crie. Il a l'impression de revoir la même rage dans les yeux de Fleur que celle qu'il avait vu dans les yeux de Kit. Alors il s'en va, en courant. Fuyant presque. Le cœur en miette. Cette fois, c'est sûr, il n'a plus rien.